ALFREDO ABEIJON | MYTHE - TEMPLE

ALFREDO ABEIJON | MYTHE - TEMPLE

Galerie

Alfredo Abeijon

MYTHE - TEMPLE

EXPOSITION /
18 OCTOBRE AU 24 NOVEMBRE, 2007

Alfredo Abeijon s'intéresse aux relations possibles et nécessaires entre l'homme et son environnement, sa relation au monde, son quotidien, sa communauté et à la structuration de sa pensée. Ses plus récents projets se nourrissaient entre autres de la mise en forme du regard sur soi, d'une délicate observation de l'homme face au monde. La forme des jours (2007), présentée à la maison de la culture Notre-Dame-de-Grâce retraçait en couleurs sur une immense structure de bois une sorte de calendrier des activités du sculpteur, un an durant, répertoriant par un code de couleurs les périodes de lavage de vaisselle comme de travail d'atelier. Un autre projet, Galileo's Garden, présentée en 2003, se laissait comprendre comme une recherche sur l'inévitable subordination de l'homme aux lois de la physique. Dans ses projets, l'artiste d'origine argentine se fait observateur; ses constructions témoignent. Elles sont portées par à un regard poétique sur notre façon d'habiter l'espace, qu'il soit physique ou social.

Avec l'installation Mythe/Temple, qu'il présente à Clark, Alfredo Abeijon propose un parcours en trois étapes, un parcours philosophique autour de la nature tripartite de l'homme tel qu'on le conçoit depuis Platon : un homme de corps, d'âme et de raison. Trois maisonnettes de bois disposées sur un plan triangulaire font office d'étapes de ce parcours, sorte de court pèlerinage qui, pourtant, propose un large regard sur cette conception de l'humanité. Ces petites maisons, construites avec beaucoup de minutie, symboliseraient l'être humain pour l'artiste. Ces trois petits temples, comme trois maisons qui en contiennent d'autres, plus petites, ont une volumétrie de 70 litres cubes, à peu près comme le corps humain. Ces jeux d'échelles et d'allusions prennent leur sens, la circumambulation engagée, une fois le corps introduit dans ces habitacles de bois, dont le dernier donne accès à une chambre intérieure. Ce parcours imposé, du corps à l'âme et de celle-ci à la raison, est essentiellement métaphorique. On propose, dans le déplacement et l'immersion, d'habiter la construction, d'en déchiffrer les codes sculpturaux et donc, d'en faire l'expérience physique.

De l'autre côté de la salle, Side Show, une seconde installation, se présente comme une réponse à la première, sinon comme sa synthèse. Suspendues à des cordelettes, du haut de la structure de bois qui les retient, trois maisonnettes s'agitent doucement derrière un écran de papier kraft. D'un côté, leurs ombres projetées dessinent sur la surface précaire, que fait frémir le ventilateur qui lui fait face, un petit théâtre de marionnettes non loin de celui dans lequel nous étions engagés physiquement dans l'autre partie de l'exposition. De l'autre, les rouages précaires de ce théâtre où se trouvent ces trois temples plus petits mais aux mêmes fonctions symboliques peuvent être observés.

Avec la simplicité et la précision qu'on lui connaît, Abeijon propose une œuvre qui tente d'incarner sa conception de l'homme, le désir qui poussa celui-ci à construire temples et cités, suivant ses coyances et son ambition. Le temple, comme l'écrit l'artiste, « est une structure qui abrite la relation entre l'homme et une conception spécifique du monde. » Le temple, comme toute architecture d'ailleurs, se fait écriture, transcription de la pensée. La transposition de cette vision de l'homme sur lui-même aura laissé sa trace sur les temples grecs, puis romains mais aussi sur les plans de nombreuses abbayes gothiques où les cloîtres et déambulatoires furent dessinés en fonction de cette équation des trois composantes de l'homme. Par l'usage du bois et la représentation de la maison, deux éléments forts présents au sein du lexique de l'artiste, Alfredo Abeijon nous convie à une déambulation allusive simple et efficace au cœur de l'architecture de la philosophie moderne, qui parle de l'homme et de l'interprétation de sa relation au monde.

Y.P.

L'artiste tient à remercier le Conseil des arts et des lettres du Québec et l'Atelier Clark pour leur aide à la production.